Temps de jeu:
1678 minutes
Le rêve d'un jeu
Voilà le genre d'expérience qui me laisse un sentiment mitigé... J'adore le cyberpunk, qu'on se le dise. J'en bouffe depuis plus de dix ans et je ne me lasse pas de ce genre d'univers, que ce soit dans les thématiques ou l'esthétique.
Cloudpunk était fait pour moi. Conduire une voiture volante dans une méga-cité futuriste était un rêve de joueur, sans exagérer. Mais un rêve seul ne fait pas un jeu...
On se retrouve en fait devant une pure expérience narrative et immersive. Pas de gameplay, en dehors du fait de se déplacer. Pas de danger. Pas de game over. Et pourquoi pas ? Je suis tout à fait ouvert à ce type d'expérience. Mais si tu amputes ton "jeu" de tout gameplay, les éléments restants doivent être irréprochables, ce qui n'est pas le cas dans Cloudpunk.
La cité arpentée par Rania, notre avatar, est une giga structure connue sous le nom de Nivalis. Et c'est une petite perle artistique. Malgré le parti-pris du voxel qui ne m'avait pas tout d'abord convaincu, je suis forcé de reconnaitre que l'aspect graphique est une franche réussite. Nivalis offre tout ce à quoi on peut s'attendre de la part d'une cité cyberpunk. Du moins les premières heures...
Cloudpunk étant avant tout un jeu de... déplacement, Rania va arpenter cette cité de long en large, en travers et en diagonale. Et, bientôt, un sentiment de lassitude naitra face à l'évidence: Nivalis manque de diversité. En pénurie manifeste d'assets, la ville nous ressasse inlassablement les mêmes structures, les mêmes boutiques, les mêmes sculptures, les mêmes graffitis... Il y a clairement une disposition semi-aléatoire d'une poignée d'éléments faits à la main. Ce qui fonctionne très bien pour les déplacements en véhicule volant, mais beaucoup moins lors des innombrables parcours à pieds imposés au joueur.
Le rythme étant très lent, nous sommes invités à entrer dans un état contemplatif qui ne peut fonctionner pleinement à cause du manque flagrant de détails des rues de Nivalis. Sans compter le level-design, extrêmement répétitif lui aussi, qui se résume la plupart du temps à une suite de grandes rues sans embranchements...
Mais qu'en est-il du scénario qui est l'élément essentiel de ce visual novel déguisé ? Il est sympathique. Juste sympathique. L'auteur a coché toutes les cases de ce que doit être une histoire cyberpunk. Le fil rouge est intéressant mais propose une thématique déjà vue dans Ghost in the Shell ou Deus Ex, par exemple. Avec moins de verve philosophique et davantage de leçons de morale politiques. Car oui, autant être prévenu: Cloudpunk explore énormément de sujets propres à la gauche radicale actuelle: appropriation culturelle, racisme, féminisme, masculinité toxique... Toujours les mêmes sujets, hélas traités avec pas mal de manichéisme, à quelques exceptions près (j'ai par exemple trouvé intéressante la métaphore de la transsexualité dans l'histoire d'un androïde qui se sent humain et ne veut pas ressembler à un robot).
On a donc quelques passages subtilement écrits et très plaisants à "jouer" mais, la plupart du temps, on nage dans le stéréotype. Les riches sont souvent des salauds, les pauvres sont souvent gentils et tout personnage un tant soit peu religieux ou conservateur est décrit comme un cinglé repoussant.
L'expérience offerte par Cloudpunk parvient néanmoins à proposer son lot de phases immersives et contemplatives. Voyager dans cette longue nuit électrique nichée au creux des nuages est une promesse de dépaysement pendant quelques heures. Dommage que le jeu soit trop long pour son propre bien. La lassitude a ruiné mon expérience pendant les dernières heures. Trop de dialogues qui tournaient en rond. Trop de décors répétés ad nauseam. Trop de leçons de morale dans un jeu qui fait semblant de te laisser des choix justement moraux...
Cloudpunk est loin d'être un échec. Mais l'expérience manque beaucoup trop de finition pour que je puisse la recommander à qui que ce soit... sauf si comme moi, vous rêvez depuis toujours de voitures volantes.
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