Temps de jeu:
1099 minutes
[i]Version courte :[/i]
- Un jeu qui en surface passe pour un jeu d’enquête banal avec une direction artistique médiévale.
- Une expérience narrative marquante qui s’appuie sur l’histoire et sa manière de la raconter.
- Des personnages très écrits qui valent le coup de prendre le temps de lire les nombreux dialogues du jeu.
[i]Version longue :[/i]
Pardonnez - moi mon père car j’ai pêché, Oui, je me confesse : j’ai joué 40 heures à Kingdom Come Delivrance avant de lâcher l’affaire. Le jeu décrivait la vie d’une personne du commun dans la Bohême du du 15ème siècle, mais force est de constater que la technique bancale de ce titre particulièrement immersif a eu raison de ma patience.
Il a eu toutefois le mérite de nourrir chez moi un intérêt pour l’histoire médiévale de cette région, ce qui m’a conduit de recommandations en recommandations vers l’intrigant Pentiment. Un jeu qui attire l'œil dans un premier temps pour sa direction artistique très particulière, mais qui s’est révélé être une bien meilleure expérience que celle anticipée.
[h1]Opus magna[/h1]
En effet comment parler de Pentiment sans aborder son style reprenant les enluminures du moyen âges : des animaux à la physionomie approximative jusqu’aux perspectives improbables, en passant par la peinture qui caille chez les personnages plus âgés, les environnement fourmillent de détails et de petits idées brillantes qui nous immergent dans le manuscrit où se passe le récit qui nous est présenté.
Le point le plus marquant pour de l’emploi de ce style est celui des dialogues : sans doublage, Pentiment parvient cependant à faire ressentir la personnalité des protagonistes dans le choix des polices d’écriture et de leurs altérations : les paysans auront une écriture à la plume et commettent régulièrement des fautes qui seront effacées par la suite, tandis que les hauts religieux auront une écriture plus sophistiquée, les personnes de culture latine, germanique, ou autre écriront différemment, et celle en colère marqueront leurs écrits de tâches de mouches. De mémoire c’est quelque chose que je n’ai jamais vu.
[h1]Alpea jacta est[/h1]
L’action se déroule dans les Alpes bavaroises au 16ème siècle. Dans la ville fictive de Tassing, contruite sur des fondations romaines (oui il existe une vraie Tassing, mais ce n’est pas celle là). Ville au carrefour entre les cultures latines et germaniques, elle est aussi un lieu de pèlerinage pour l’église catholique, alors que le protestantisme se diffuse à travers l’empire romain germanique. Cette position et ce cadre historique sont particulièrement intéressants car elle vont servir de carcan aux enjeux de fond de l’histoire.
Nous incarnons Andreas Maller, un jeune artiste venu à l'abbaye de Kiersau pour réaliser son chef d’oeuvre, un travail d’enluminure. Lieu de pèlerinage autour d’une relique d’un saint local, son activité tend à ralentir du fait des débuts de l’imprimerie avec les presses de Guttenberg.
Josh Sawyer, le réalisateur de Pentiment est un des grands noms du “CRPG” avec à son actif des titres emblématiques comme Icewind Dale, Pillars of Eternity et bien évidemment Fallout New Vegas. De ce que j’ai appris de mes recherches, Pentiment est un projet de longue date qui se voulait un RPG plus classique, restent de cette culture certains aspects, notamment les arborescences narratives et les compétences de notre personnage.
En effet Andreas étant un touche à tout en plus d’un artiste voyageant beaucoup, peut hériter selon nos choix, de différentes compétences et aptitudes qui vont nous servir de point d’appui : serez - vous polyglotte et porté sur la religion, aurez - vous un intérêt pour la médecine ou les sciences naturelle ? C’est à vous de modeler un profil qui réponde à vos goûts. Cela ouvre la plupart du temps des interactions et répliques inédites qui vous faciliterons la vie la plupart du temps.
[h1]Tempus edax rerum[/h1]
Nous suivons donc Andreas dans son apprentissage et sa vie quotidienne dans un premier temps : on prend connaissance de Tassing et de ses alentours que l’on va beaucoup arpenter, faute de système de déplacement rapide, on comprend que certains choix d’activité vont consommer du temps à la manière d’un Persona, et que le jeu est très bavard, bien que très bien écrit. Aussi je vous recommande de ne vous lancer dans Pentiment que si vous êtes sur de vouloir beaucoup lire, mais pour vous y encourager je dirais que peut sont les jeux où la lecture me fut aussi plaisante.
Bien entendu et sans en dévoiler davantage, un drame survient à l’abbaye et Andreas va se trouver plonger au cœur d’une intrigue captivante qui va s’étaler sur une époque relativement longue. Car ô grande surprise, nous allons suivre l’évolution de Tassing sur plusieurs périodes. On sera donc très curieux de voir les changements de décors, de voir les personnages vieillir et évoluer plus ou moins bien selon nos choix.
Point que j'ai particulièrement apprécié le ton du jeu n'est pas manichéen. Montrer de la sympathie pour un personnage ne conduit pas nécessairement à un heureux dénouement et on vous demandera parfois de trancher dans des situations où tous les partis opposés ont des motifs valables de faire ce qu'ils font. Et parfois ces décisions entraîneront des conséquence qu'il était difficile de prévoir. Ce ton fait du petit univers de Pentiment un ensemble cohérent car il relate de manière crédible des comportements humains - et non des scripts de PNJ au service du joueur.
Un thème prégnant dans Pentiment est l’histoire et la manière dont on choisit de la raconter, car si le jeu vous propose des séances d’investigation assez classique, bien que intentionnellement insatisfaisantes, il nous posera de nombreux dilemmes et créera une implication qui est selon moi la marque des bons jeux.
Un autre thème évident est celui de l’emprise de la religion sur les vies des petites gens, et le jeu parvient à aborder des thèmes contemporains au travers de ce cadre avec beaucoup de tact et de pertinence. On s’attache beaucoup à ces personnages, on aime les voir évoluer, on en hait certains, mais peux nous laissent indifférents. Une prouesse pour un jeu qui ne contient aucun dialogue doublé.
[h1]Verba volant, scripta manent[/h1]
Se vendant de loin comme un jeu d’enquête avec de jolies images stylisées, Pentiment est un jeu qui pousse à la réflexion sur nos choix et leurs conséquences, malgré ses mécaniques austères et sa navigation rigide, c’est un des meilleurs jeux de l’année de sa sortie. Qui plus est, il constitue une belle exploration de l’Histoire avec quelques prises de liberté, mais une cohérence globale qui marque.
Si vous avez aimé Pentiment :
Disco Elysium
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En fançais dans le texte, contrôles manette ok.
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